Louis-Jérôme Gohier , homme politique français, ministre français de la Justice (décédé en 1830)
Louis-Jérôme Gohier (27 février 1746 – 29 mai 1830) fut une figure marquante de la scène politique française durant les tourbillons de la Révolution. Avocat de profession, il navigua à travers les différentes phases de cette période tumultueuse, occupant des postes clés, du législatif à l'exécutif, et laissant son empreinte, notamment par sa résistance face à l'ascension de Napoléon Bonaparte.
Né à Semblançay, un charmant village d'Indre-et-Loire, Louis-Jérôme Gohier était le fils d'un notaire. Suivant les traces familiales, il embrassa la carrière juridique et pratiqua le droit avec distinction dans la ville de Rennes, capitale historique de la Bretagne. Ses compétences et son engagement ne tardèrent pas à le propulser sur le devant de la scène politique à l'aube de la Révolution française.
Une Ascension Politique au Début de la Révolution
En 1789, alors que la France s'apprêtait à vivre des changements sans précédent, Louis-Jérôme Gohier fut choisi par ses pairs pour représenter la ville de Rennes en tant que député du Tiers état aux États généraux. Cette assemblée historique, convoquée par le roi Louis XVI, marqua le point de départ de la Révolution, et la participation de Gohier témoigne de sa légitimité et de sa capacité à défendre les intérêts de ses concitoyens face aux ordres privilégiés.
Par la suite, son parcours le mena à l'Assemblée législative, où il siégea en tant que représentant du département d'Ille-et-Vilaine. Là, Gohier s'illustra par une participation active et une influence notable dans les délibérations, affirmant ses convictions et son sens de l'État. C'est durant cette période qu'il prit publiquement position sur des sujets brûlants qui divisaient alors la nation. Il protesta ainsi, le 22 novembre 1791, contre l'imposition du nouveau serment civique aux prêtres, un acte symbolisant le schisme entre l'Église et l'État initié par la Constitution civile du clergé. Son geste soulignait une forme de prudence et, pour certains, un respect des libertés religieuses face aux exigences révolutionnaires. Quelques mois plus tard, le 7 février 1792, il appuya une mesure radicale mais nécessaire aux yeux des révolutionnaires : la demande de séquestre des biens des émigrés, c'est-à-dire les nobles et ecclésiastiques ayant fui la France et souvent conspiré contre le nouveau régime. Cette position illustre sa détermination à consolider les acquis révolutionnaires.
Au Cœur du Pouvoir Révolutionnaire
L'ascension de Gohier se poursuivit à travers les différentes étapes de la Révolution. De mars 1793 à avril 1794, il occupa le poste stratégique de Ministre de la Justice. Durant cette période, particulièrement tendue et marquée par la Terreur, il eut la lourde tâche de superviser des décisions majeures, dont l'arrestation des Girondins. Ces derniers, représentants d'une faction modérée de la Révolution, furent éliminés politiquement par les Montagnards, plus radicaux, dans un climat de purge et d'épuration. La position de Gohier à la tête de la justice durant ces événements sombres témoigne de son positionnement au sein de la ligne gouvernementale du moment.
Après la chute de Robespierre et la fin de la Terreur, il continua à jouer un rôle actif dans la politique nationale. Il devint membre du Conseil des Cinq-Cents, l'une des deux chambres législatives sous le Directoire, la première république française post-révolutionnaire qui cherchait à stabiliser le pays après des années de bouleversements.
Le Directoire et le Coup du 18 Brumaire
En juin 1799, Louis-Jérôme Gohier atteignit l'apogée de sa carrière politique en succédant à Jean-Baptiste Treilhard comme membre du Directoire lui-même, l'organe exécutif collégial qui dirigeait la France. À ce poste, il se fit le fervent défenseur de la vision républicaine face à une opposition royaliste grandissante, mais aussi face aux ambitions de figures militaires montantes. La période du Directoire était en effet marquée par une grande instabilité politique, des complots récurrents et une crise économique persistante, préparant le terrain à un changement radical.
C'est dans ce contexte troublé que Gohier se distingua par sa fidélité aux principes républicains. Il fut l'un des Directeurs qui s'opposèrent farouchement au coup d'État du 18 Brumaire (9 novembre 1799), orchestré par le général Napoléon Bonaparte. Alors que Bonaparte cherchait à renverser le Directoire pour instaurer le Consulat et concentrer le pouvoir entre ses mains, Gohier refusa catégoriquement de démissionner, s'accrochant à la légalité républicaine. Sa résistance lui valut d'être placé en résidence surveillée, puis arrêté, marquant la fin brutale de sa carrière politique active et le début de l'ère napoléonienne.
Après le coup d'État, Louis-Jérôme Gohier se retira de la vie publique. Il vécut une existence plus discrète, mais son nom resta associé à cette ultime tentative de préserver les institutions de la Première République face à l'ambition d'un homme. Il décéda le 29 mai 1830, peu de temps avant la Révolution de Juillet, emportant avec lui le souvenir d'une époque révolue et d'un engagement indéfectible envers ses idéaux.
Foire Aux Questions (FAQ)
- Qui était Louis-Jérôme Gohier ?
- Louis-Jérôme Gohier (1746-1830) était un homme politique français, avocat de profession, qui a joué un rôle significatif durant la période de la Révolution française, notamment en tant que député, Ministre de la Justice, membre du Conseil des Cinq-Cents et Directeur.
- Quels furent ses débuts politiques ?
- Il a commencé sa carrière politique en 1789 en tant que député du Tiers état pour Rennes aux États généraux, puis a représenté l'Ille-et-Vilaine à l'Assemblée législative.
- Pourquoi le "serment aux prêtres" était-il controversé ?
- Le "serment aux prêtres" (ou serment civique) était une obligation imposée par la Constitution civile du clergé de 1790, exigeant que les membres du clergé jurent fidélité à la nation, à la loi et au roi, et soutiennent la Constitution. Beaucoup de prêtres le refusèrent, le considérant comme une ingérence de l'État dans les affaires de l'Église, ce qui mena à une profonde division religieuse et politique.
- Quel rôle a-t-il joué en tant que Ministre de la Justice ?
- De mars 1793 à avril 1794, en pleine période de la Terreur, Louis-Jérôme Gohier a été Ministre de la Justice. À ce titre, il a supervisé des événements majeurs, dont l'arrestation des Girondins, une faction politique modérée de la Révolution.
- Comment a-t-il participé au Directoire ?
- En juin 1799, il est devenu membre du Directoire, l'organe exécutif de la Première République française. Il y a défendu les principes républicains face aux défis internes et externes, notamment l'opposition royaliste.
- Quel a été son rôle lors du Coup d'État du 18 Brumaire ?
- Louis-Jérôme Gohier fut l'un des Directeurs qui s'est fermement opposé au coup d'État du 18 Brumaire (9 novembre 1799) mené par Napoléon Bonaparte. Il refusa de démissionner et fut de ce fait arrêté, marquant la fin de sa carrière politique et sa ferme opposition à la prise de pouvoir de Bonaparte.