Maurice Gamelin, général belgo-français (né en 1872)

Maurice Gustave Gamelin, né le 20 septembre 1872 et décédé le 18 avril 1958, fut une figure complexe et souvent controversée de l'histoire militaire française. Général de l'armée, sa carrière est marquée par un paradoxe saisissant : vénéré pour ses contributions décisives à la victoire de la France lors de la Première Guerre mondiale, il est malheureusement resté dans les annales comme le commandant en chef dont la stratégie fut jugée désastreuse pendant la bataille de France de mai 1940, menant à la chute rapide du pays face à l'Allemagne nazie. Parallèlement, il fut un défenseur intransigeant des valeurs républicaines, une position courageuse dans une période de forte instabilité politique en France.

Un parcours militaire prometteur et une vision républicaine

Dès ses débuts, Gamelin montra des aptitudes intellectuelles remarquables, ce qui lui valut une réputation d'esprit fin et cultivé. Pendant la Première Guerre mondiale, il servit avec distinction sous les ordres du maréchal Joseph Joffre, son rôle étant particulièrement crucial en 1914. Il est en effet souvent crédité d'avoir été l'architecte des grandes lignes de la contre-offensive française qui aboutit à la victoire de la première bataille de la Marne. Cet épisode fut capital, car il stoppa l'avancée allemande sur Paris et figea le front pour les années à venir, évitant un effondrement précoce de la France. Cette réussite précoce forgea une image de stratège avisé.

Dans l'entre-deux-guerres, Maurice Gamelin continua son ascension, et en 1933, il prit les rênes de l'armée française en tant que Commandant en Chef. À ce poste, il supervisa des programmes ambitieux de modernisation et de mécanisation de l'armée, tentant de l'adapter aux défis futurs, tout en veillant à l'achèvement de la célèbre Ligne Maginot. Cette ligne de fortifications, bien que conçue pour une guerre défensive et statique, était perçue comme un rempart infranchissable, illustrant une doctrine militaire résolument ancrée dans les leçons de la Grande Guerre.

Au-delà de ses compétences militaires, Gamelin était profondément attaché aux idéaux de la Troisième République. Son refus catégorique de laisser la politique s'immiscer dans la planification stratégique et les promotions militaires lui valut le soutien indéfectible de personnalités politiques influentes comme Édouard Daladier, alors Président du Conseil. Cette intégrité était d'autant plus remarquable qu'elle s'exerçait dans une France déchirée par les extrêmes : les communistes à gauche, et les royalistes et fascistes à droite, tous prônant ouvertement un changement radical de régime. Sa loyauté envers la République était une ancre dans un océan de turbulences politiques.

Le défi de la Seconde Guerre mondiale et la défaite de 1940

Au début de la Seconde Guerre mondiale, Gamelin était perçu par beaucoup comme l'homme de la situation, fort de son expérience et de son intellect. Curieusement, même certains de ses homologues allemands reconnaissaient son intelligence et son « esprit subtil ». Cependant, cette admiration était souvent tempérée par une critique : ils le jugeaient rigide et prévisible dans ses approches. Cette rigidité se révéla fatale face à la Blitzkrieg allemande, une doctrine de guerre rapide et mobile qui allait bouleverser les schémas de pensée militaires établis.

Le point culminant de sa carrière, et tragiquement son point de rupture, fut la bataille de France, qui débuta le 10 mai 1940. En dépit de ses tentatives de modernisation, l'armée française, sous son commandement, fut incapable de s'adapter à la vitesse et à la coordination des attaques allemandes. L'historien et journaliste William L. Shirer a bien résumé la critique principale portée à Gamelin : il aurait tenté de combattre la Seconde Guerre mondiale avec les méthodes de la Première Guerre mondiale, mais avec moins d'énergie, une réactivité plus lente et une incapacité à innover tactiquement face à un ennemi radicalement différent. Son commandement fut jugé si inadapté que Gamelin fut relevé de ses fonctions le 17 mai 1940, juste une semaine après le début de l'offensive, marquant la fin de sa carrière militaire et le début d'une période de controverse historique intense autour de son rôle dans la défaite française.

Héritage et analyse posthume

La figure de Maurice Gamelin reste profondément ambivalente dans l'histoire française. Stratège de génie lors de la Marne, modernisateur de l'armée dans l'entre-deux-guerres et fervent républicain, il est paradoxalement devenu le symbole d'une défaite fulgurante et inattendue. Son histoire est celle d'un homme brillant, mais dont la vision s'est peut-être avérée trop ancrée dans le passé pour anticiper les bouleversements de la guerre moderne, laissant un héritage complexe à méditer pour les générations futures.

Foire Aux Questions (FAQ)

Qui était Maurice Gamelin ?
Maurice Gustave Gamelin était un général de l'armée française, né en 1872 et décédé en 1958. Il est connu pour son rôle stratégique durant la Première Guerre mondiale et son commandement controversé au début de la Seconde Guerre mondiale.
Quel a été son rôle le plus important pendant la Première Guerre mondiale ?
Il est souvent crédité d'avoir conçu les grandes lignes de la contre-offensive française qui a mené à la victoire lors de la première bataille de la Marne en septembre 1914, un moment décisif qui a stoppé l'avancée allemande.
Pourquoi son commandement pendant la Seconde Guerre mondiale est-il considéré comme désastreux ?
Son commandement fut jugé inadapté face aux tactiques de la Blitzkrieg allemande en mai 1940. Les critiques, dont l'historien William L. Shirer, estiment qu'il a appliqué des méthodes de la Première Guerre mondiale, axées sur une guerre statique, à une guerre de mouvement rapide, ce qui a entraîné un manque de réactivité et une défaite rapide.
Quelle était sa position politique ?
Gamelin était un fervent défenseur des valeurs républicaines. Il s'opposait à l'ingérence de la politique dans les affaires militaires et fut soutenu par des figures comme Édouard Daladier pour son attachement au modèle de gouvernement républicain, à une époque où la République était menacée par les extrêmes.
Quel a été son rôle concernant la Ligne Maginot ?
En tant que Commandant en Chef de l'armée française à partir de 1933, Gamelin a supervisé l'achèvement des défenses de la Ligne Maginot. Cette ligne incarnait la stratégie défensive française basée sur les leçons de la Première Guerre mondiale.
Quand a-t-il été relevé de son commandement en 1940 ?
Maurice Gamelin a été relevé de son poste de Commandant en Chef des Forces armées françaises le 17 mai 1940, une semaine seulement après le début de l'offensive allemande en France.