Ferdinand VII d'Espagne (né en 1784)
Ferdinand VII d'Espagne, de son nom complet Ferdinand María Francisco de Paula Domingo Vicente Ferrer Antonio José Joaquín Pascual Diego Juan Nepomuceno Genaro Francisco de Asís, né le 14 octobre 1784 au Palais de l'Escurial et décédé le 29 septembre 1833 à Madrid, fut une figure emblématique et controversée de la monarchie espagnole du début au milieu du XIXe siècle. Son règne, marqué par des interruptions et des retournements politiques majeurs, s'étendit de manière éphémère en 1808, puis de manière plus durable de 1813 jusqu'à sa mort. Connu de ses partisans sous l'appellation affectueuse d'el Deseado (le Désiré), en raison des espoirs qu'il incarnait face à l'occupation napoléonienne, il fut dénoncé par ses détracteurs comme el Rey Felón (le roi félon) pour sa trahison des idéaux libéraux et son penchant pour l'absolutisme.
L'Ascension au Trône et la Période Napoléonienne
Fils du roi Charles IV et de Marie-Louise de Parme, Ferdinand passa sa jeunesse en tant qu'héritier présomptif d'un trône chancelant. Son accession au pouvoir fut précipitée par le Tumulte d'Aranjuez en mars 1808, une révolte populaire orchestrée par des factions nobles et soutenue par Ferdinand lui-même, visant à destituer le favori Manuel Godoy et à forcer l'abdication de son père. Ferdinand monta alors sur le trône pour la première fois. Cependant, cette période fut de courte durée. Profitant de la faiblesse de la monarchie espagnole et des tensions familiales, Napoléon Bonaparte invita la famille royale à Bayonne, où il força Charles IV et Ferdinand VII à abdiquer en sa faveur (les célèbres Abdications de Bayonne). Napoléon installa ensuite son frère Joseph Bonaparte sur le trône espagnol, déclenchant ainsi la Guerre d'Indépendance espagnole (1808-1814).
Pendant que Ferdinand était captif en France, la résistance espagnole luttait au nom du "roi absent". C'est durant cette période que les Cortes de Cadix, une assemblée législative extraordinaire, élaborèrent et promulguèrent la Constitution de 1812, également connue sous le nom de "La Pepa", un document libéral qui visait à moderniser le pays et à limiter les pouvoirs du monarque.
Le Retour à l'Absolutisme et la Réaction
En décembre 1813, suite aux revers de Napoléon en Europe, Ferdinand VII fut libéré et regagna l'Espagne. Son retour fut salué par une partie de la population qui le voyait comme le libérateur du joug français. Cependant, les espoirs des libéraux furent rapidement déçus. Fort du soutien des factions conservatrices et d'une partie de l'armée, Ferdinand VII ne tarda pas à abroger la Constitution de 1812 et à restaurer l'absolutisme royal par le décret de Valence du 4 mai 1814. Cette décision marqua le début d'une période de répression féroce contre les libéraux et les "afrancesados" (Espagnols ayant collaboré avec le régime français), entraînant des exils, des emprisonnements et des exécutions. Il s'attela à effacer toute trace des réformes libérales, rétablissant l'Inquisition et les privilèges de l'Ancien Régime, créant ainsi un fossé profond et durable entre les forces conservatrices et les libéraux en Espagne.
Le Triennat Libéral et la Seconde Restauration Absolutiste
Le mécontentement grandissant parmi l'armée et les cercles libéraux conduisit à une série de pronunciamientos (coups d'État militaires). C'est celui du colonel Rafael del Riego en 1820, débuté à Cabezas de San Juan (Séville), qui força Ferdinand VII à prêter serment à la Constitution de 1812, inaugurant ainsi le Triennat Libéral (1820-1823). Cette période fut caractérisée par des tentatives de réformes profondes (suppression de l'Inquisition, réformes agraires, réduction du pouvoir de l'Église) mais aussi par de fortes divisions entre les libéraux eux-mêmes et des insurrections royalistes. Face à cette instabilité et à la menace que représentait le libéralisme pour les monarchies européennes, le Congrès de Vérone en 1822 autorisa une intervention militaire étrangère. En 1823, une armée française, les "Cent Mille Fils de Saint Louis", envahit l'Espagne et rétablit Ferdinand VII dans ses pouvoirs absolus. Cette seconde restauration absolutiste marqua le début de la "Décennie Ominosa" (1823-1833), une période encore plus sévère de persécution des libéraux, de censure de la presse et d'une administration répressive.
Un Règne Marquée par la Perte Coloniale et la Crise de Succession
Sous le règne de Ferdinand VII, l'Espagne perdit la quasi-totalité de ses possessions américaines continentales, incapables de réprimer les mouvements d'indépendance qui avaient pris de l'ampleur pendant les guerres napoléoniennes et la période libérale. Le pays, déjà affaibli, s'enfonçait dans une profonde crise économique et politique. La fin de son règne fut également marquée par une grave crise de succession. N'ayant eu que des filles survivantes de son quatrième mariage avec Marie-Christine de Bourbon, Ferdinand abolit la loi salique (qui empêchait les femmes d'accéder au trône) par la Pragmatique Sanction de 1830, en faveur de sa fille aînée, la future Isabelle II. Cette décision fut contestée par son frère, Don Carlos, qui se considérait comme l'héritier légitime. À la mort de Ferdinand VII en 1833, cette dispute dynastique plongea l'Espagne dans les guerres carlistes, une série de conflits civils qui divisèrent le pays pendant des décennies.
Héritage et Perception Historique
L'héritage politique de Ferdinand VII est resté l'objet de vifs débats depuis son décès. De nombreux historiens le décrivent comme un monarque incompétent, despotique et myope, incapable de comprendre les évolutions de son temps et d'offrir une vision cohérente pour l'Espagne. Sa politique a non seulement conduit à l'effondrement de l'Empire espagnol d'outre-mer, mais a aussi exacerbé les divisions internes, posant les bases des conflits qui déchireraient l'Espagne tout au long du XIXe et du début du XXe siècle. Il symbolise pour beaucoup l'échec d'une transition pacifique vers la modernité, préférant la restauration d'un Ancien Régime voué à disparaître.
Questions Fréquemment Posées (FAQ)
- Qui était Ferdinand VII d'Espagne ?
- Ferdinand VII fut Roi d'Espagne de 1808, puis de 1813 à 1833. Son règne fut marqué par des tentatives de restauration absolutiste, des périodes libérales forcées et la perte de la plupart des colonies espagnoles en Amérique.
- Pourquoi était-il surnommé "el Deseado" et "el Rey Felón" ?
- Il fut surnommé el Deseado (le Désiré) par ses partisans, car il incarnait l'espoir de libérer l'Espagne de l'occupation napoléonienne. Il fut appelé el Rey Felón (le roi félon) par ses détracteurs, en raison de sa trahison des idéaux libéraux et de son abrogation de la Constitution de 1812.
- Quelle a été l'influence de Napoléon Bonaparte sur son règne ?
- Napoléon Bonaparte a joué un rôle déterminant en forçant Ferdinand VII et son père à abdiquer en 1808, installant Joseph Bonaparte sur le trône espagnol. Cela déclencha la Guerre d'Indépendance espagnole et l'élaboration de la Constitution de 1812 en son absence.
- Qu'est-ce que le Triennat Libéral ?
- Le Triennat Libéral (1820-1823) fut une période de trois ans où Ferdinand VII fut contraint par une révolte militaire (celle de Rafael del Riego) à restaurer la Constitution libérale de 1812, marquant un bref intermède de régime constitutionnel avant la seconde restauration absolutiste.
- Qu'est-ce que la Constitution de 1812, et pourquoi Ferdinand VII l'a-t-il rejetée ?
- Également appelée "La Pepa", la Constitution de 1812 était une constitution libérale élaborée par les Cortes de Cadix pendant l'occupation napoléonienne. Ferdinand VII l'a rejetée à son retour en 1814 car il la considérait comme une menace à son pouvoir absolu et aux traditions monarchiques, privilégiant un régime d'Ancien Régime.
- Qu'est-ce qui a conduit aux guerres carlistes après sa mort ?
- La mort de Ferdinand VII déclencha les guerres carlistes à cause d'une crise de succession. N'ayant pas d'héritier mâle, il abolit la loi salique par la Pragmatique Sanction de 1830 pour que sa fille Isabelle puisse lui succéder. Son frère, Don Carlos, refusa de reconnaître cette décision, s'estimant l'héritier légitime, menant à un conflit dynastique et idéologique.
- Quel est l'héritage historique de Ferdinand VII ?
- Son héritage est largement controversé. Il est souvent perçu comme un monarque autoritaire et inefficace, dont les politiques ont conduit à la perte de l'empire colonial espagnol et ont enraciné des divisions profondes entre libéraux et absolutistes, contribuant à l'instabilité politique de l'Espagne pour le siècle à venir.