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Quarter Days et Term Days : ces dates historiques qui rythment encore loyers, écoles et justice

Résumé — Les Quarter Days et Term Days sont des dates saisonnières, souvent liées à des fêtes religieuses, qui servaient autrefois de repères pour payer le loyer, embaucher des travailleurs et organiser les sessions de tribunaux. Si leur rôle s’est atténué, on en retrouve encore l’empreinte dans l’année fiscale britannique, les calendriers universitaires (Michaelmas, Hilary, Trinity) et certaines clauses de baux commerciaux.

En d’autres termes, ces dates historiques continuent de structurer, discrètement mais réellement, nos rythmes administratifs, scolaires et juridiques.

Que sont les Quarter Days et Term Days ?

Dans les îles Britanniques, les Quarter Days (jours du trimestre) désignaient quatre jalons fixes de l’année où l’on réglait loyers, gages et impôts, ou renouvelait contrats et baux. Les Term Days (jours de terme) renvoient de leur côté aux termes juridiques des tribunaux et, par extension, aux périodes universitaires nommées d’après ces termes.

  • Usage économique : échéances de loyers, soldes, taxes locales, marchés d’embauche.
  • Usage juridique : ouverture/fermeture des cours de justice, délais de procédure.
  • Usage académique : noms et séquençage des trimestres universitaires.

Les Quarter Days anglais : Lady Day, Midsummer, Michaelmas, Christmas

En Angleterre et au pays de Galles, quatre dates structuraient traditionnellement l’année :

  • Lady Day (Annonciation) — 25 mars
  • Midsummer Day (Saint-Jean d’été) — 24 juin
  • Michaelmas (Saint-Michel) — 29 septembre
  • Christmas (Noël) — 25 décembre

Ces Quarter Days jalonnaient paiements de loyers, règlements de gages et prise de fonctions des domestiques et apprentis. Le calendrier des foires saisonnières, des recrutements agricoles et d’une partie de la fiscalité locale s’alignait sur ces dates. Michaelmas, par exemple, marquait l’ouverture de l’année judiciaire et académique.

Le basculement de calendrier et ses effets

Le Royaume-Uni est passé du calendrier julien au grégorien en 1752, supprimant 11 jours (du 2 au 14 septembre). Lady Day, autrefois pivot de l’année financière, a glissé dans la pratique vers le 5 avril, puis vers le 6 avril au XIXe siècle, pour compenser un décalage supplémentaire lié aux règles bissextiles. C’est pourquoi l’année fiscale britannique commence encore aujourd’hui le 6 avril, héritage direct des Quarter Days.

Les Term Days juridiques : Hilary, Easter, Trinity, Michaelmas

Les Term Days renvoient aux périodes où les juridictions supérieures anglaises siégeaient :

  • Michaelmas Term — autour d’octobre-décembre
  • Hilary Term — en hiver (janvier-février)
  • Easter Term — au printemps
  • Trinity Term — de la fin du printemps au début de l’été

Ces termes ont été progressivement réformés aux XIXe et XXe siècles pour permettre des audiences plus régulières tout au long de l’année. La “legal year” en Angleterre et au pays de Galles commence toujours à Michaelmas (début octobre) lors d’une cérémonie d’ouverture des tribunaux. Les noms des Term Days subsistent donc à la fois dans l’organisation judiciaire et dans le langage courant du monde du droit.

Écosse : des Term Days aux Quarter Days modernes

L’Écosse avait ses propres jours de terme, utilisés pour les baux, les déménagements et les embauches :

  • Candlemas — 2 février
  • Whitsunday — 15 mai
  • Lammas — 1er août
  • Martinmas — 11 novembre

Les marchés d’embauche (feein’ markets) et le début des baux ruraux s’articulaient autour de Whitsunday et Martinmas. Aujourd’hui, le Term and Quarter Days (Scotland) Act 1990 fixe, pour des besoins juridiques, des dates modernisées et régulières : 28 février, 28 mai, 28 août, 28 novembre. Les anciens noms restent vivants dans la culture et certaines institutions académiques.

Universités : Michaelmas, Hilary/Lent et Trinity en salle de classe

Les traditions juridiques ont contaminé les calendriers universitaires :

  • Oxford : Michaelmas (automne), Hilary (hiver), Trinity (printemps/été).
  • Cambridge : Michaelmas (automne), Lent (hiver) et Easter (printemps).
  • LSE et d’autres universités britanniques : Michaelmas, Lent, Summer.
  • St Andrews (Écosse) : tradition des semestres Martinmas et Candlemas, encore visible dans certaines communications.

Au-delà du folklore, ces noms déterminent des fenêtres administratives (inscriptions, examens, dépôt de thèses) et influencent le marché locatif étudiant (début d’occupation autour de Michaelmas, renouvellements au printemps).

Irlande et Europe : équivalents et cousins culturels

En Irlande, les loyers et embauches ont longtemps suivi des “gale days” proches des Quarter Days anglais (25 mars, 24 juin, 29 septembre, 25 décembre). En parallèle, les fêtes gaéliques dites “cross-quarter” (Imbolc — 1er février, Bealtaine — 1er mai, Lughnasadh — 1er août, Samhain — 1er novembre) ont rythmé la vie rurale, les foires et les transmissions de fermes.

Sur le continent, beaucoup de régions ont connu des jours de terme associés à de grandes fêtes :

  • Allemagne : paiements ruraux à Michaelis (29 septembre) et échéances saisonnières.
  • France : “jours de terme” urbains alignés sur des quarts (janvier, avril, juillet, octobre), remplacés au XXe siècle par des loyers mensuels. Le vocabulaire du “terme” reste courant en droit des baux.
  • Europe du Nord : sessions municipales et marchés saisonniers calés sur des saints ou solstices.

Autrement dit, si les noms diffèrent, l’idée d’échéances trimestrielles ritualisées est largement européenne.

Pourquoi ces dates ont-elles compté ?

Avant la modernité administrative, fixer des échéances à des jalons mémorisables (fêtes religieuses, solstices) simplifiait la vie économique et juridique :

  • Faciles à retenir et à faire respecter dans des sociétés peu alphabétisées.
  • Alignées sur les cycles agricoles (cueillettes, moissons, mise en pâture).
  • Synchronisées avec les flux de main-d’œuvre (domestiques, apprentis, journaliers).

Où ces dates subsistent-elles aujourd’hui ?

1) Fiscalité et finances publiques

  • Année fiscale britannique : du 6 avril au 5 avril, héritage direct de Lady Day après le passage au calendrier grégorien.
  • Budgets locaux et redevances historiques

2) Baux et loyers, surtout commerciaux

  • De nombreux baux commerciaux britanniques continuent de prévoir un loyer payable aux Quarter Days (25 mars, 24 juin, 29 septembre, 25 décembre), même si le règlement mensuel par prélèvement gagne du terrain.
  • Les service charges (charges d’immeuble) et appels de fonds de copropriété peuvent encore s’aligner sur ces quarts.

3) Monde académique

  • Les noms Michaelmas, Hilary/Lent, Trinity structurent encore les années universitaires à Oxford, Cambridge et ailleurs.
  • En Écosse, la terminologie Martinmas/Candlemas demeure vivace dans certaines universités historiques.

4) Justice et professions du droit

  • La legal year en Angleterre et au pays de Galles s’ouvre à Michaelmas (début octobre), avec des références persistantes aux quatre Terms dans la pratique et les annuaires juridiques.

Comment ces dates ont-elles évolué ?

Trois dynamiques expliquent l’évolution des Quarter Days et Term Days :

  • Réforme des calendriers : adoption du grégorien aux dates variables en Europe (1582, puis XVIIe–XVIIIe siècles ; 1918 en Russie) a entraîné des glissements (ex. Old Michaelmas vers le 10 octobre dans le folklore).
  • Modernisation administrative : paiements mensualisés, exercice budgétaire standardisé, tribunaux siégeant toute l’année.
  • Urbanisation : l’économie industrielle a réduit l’ancrage agricole des embauches et des baux saisonniers.

Malgré tout, ces dates sont restées des repères pratiques, utiles pour segmenter l’année en quatre blocs stables — une logique qui survit dans le langage et certaines routines opérationnelles.

Exemples concrets et cas d’usage aujourd’hui

  • Bail commercial à Londres : loyer dû « par quartier civil » — avec des appels de fonds au 25 mars, 24 juin, 29 septembre, 25 décembre.
  • Université d’Oxford : rentrée de Michaelmas à l’automne, influant sur la demande locative étudiante et les périodes de contrat.
  • Conseil aux locataires : une clause « payable on the Quarter Days » impose d’anticiper la trésorerie, même si le bail autorise un échelonnement mensuel.
  • Écosse : la pratique notariale peut faire référence aux dates du 28/02, 28/05, 28/08, 28/11 pour des effets légaux standardisés.

Questions pratiques que l’on se pose souvent

Pourquoi l’année fiscale du Royaume-Uni commence-t-elle le 6 avril ?

Parce que l’ancienne année financière débutait à Lady Day (25 mars). Le passage au calendrier grégorien en 1752 a décalé la date de 11 jours (vers le 5 avril), puis un ajustement supplémentaire a fixé le 6 avril. C’est un vestige direct des Quarter Days.

Les Quarter Days ont-ils encore une force obligatoire ?

Uniquement s’ils sont prévus par contrat (ex. bail commercial) ou par des règlements internes. Dans de nombreux cas, la mensualisation a remplacé les échéances trimestrielles traditionnelles.

Ces dates varient-elles selon les pays ?

Oui. Si l’Angleterre/Wales et l’Écosse ont des ensembles de dates bien identifiés, l’Irlande, l’Allemagne, la France et d’autres pays européens ont eu leurs propres jours de terme, souvent calés sur des grandes fêtes ou des fins de trimestre civil.

Y a‑t‑il des “Old Style” et “New Style” ?

Dans le monde anglophone, on distingue parfois des versions Old Style (julien) et New Style (grégorien) pour des fêtes comme Michaelmas, expliquant des dates « doubles » dans le folklore. Juridiquement, ce sont les dates modernes qui prévalent.

Les noms de Michaelmas, Hilary, Trinity ont-ils un sens hors du Royaume-Uni ?

Ils sont surtout utilisés dans la tradition britannique, mais l’idée de termes académiques nommés selon des repères religieux ou saisonniers se retrouve ailleurs, sous d’autres appellations.

Conseils pratiques si votre document mentionne Quarter Days/Term Days

  • Lisez la définition du bail ou de la politique interne : les dates précises peuvent être listées (ex. 25/03, 24/06, 29/09, 25/12) ou « fin de trimestre ».
  • Négociez l’échelonnement si la trésorerie mensuelle est préférable : beaucoup de propriétaires acceptent les paiements mensuels tout en conservant les Quarter Days comme dates d’exigibilité.
  • Anticipez les pics : Michaelmas et Lady Day coïncident souvent avec d’autres échéances (assurances, taxes locales).
  • Universités : vérifiez les périodes Michaelmas/Hilary/Lent/Trinity pour caler les contrats de travail ou les baux étudiants.

Une empreinte qui dépasse le folklore

Les Quarter Days et Term Days ne sont pas de simples curiosités historiques. Ils continuent d’influencer la fiscalité (année fiscale du 6 avril), l’enseignement supérieur (Michaelmas, Hilary/Lent, Trinity) et certains contrats immobiliers. S’ils ont perdu leur centralité opérationnelle au profit de la mensualisation et des calendriers administratifs modernes, ils restent des repères d’organisation utiles, profondément ancrés dans la mémoire collective et les textes.

FAQ

Quelles sont les quatre Quarter Days en Angleterre ?

Lady Day (25 mars), Midsummer (24 juin), Michaelmas (29 septembre) et Christmas (25 décembre).

Pourquoi parle-t-on de Term Days dans les universités ?

Parce que les Term Days juridiques ont donné leurs noms à des périodes académiques : Michaelmas, Hilary/Lent, Trinity/Easter. Ces appellations subsistent à Oxford, Cambridge et dans d’autres établissements.

Quelles dates ont remplacé les termes écossais traditionnels ?

Pour des effets juridiques modernes, l’Écosse utilise le 28 février, 28 mai, 28 août et 28 novembre, tandis que les noms Candlemas, Whitsunday, Lammas et Martinmas restent connus culturellement.

Les loyers sont-ils encore payés aux Quarter Days au Royaume-Uni ?

Dans le résidentiel, le paiement mensuel domine. En commercial, beaucoup de baux prévoient encore des échéances aux Quarter Days, même si un étalement mensuel est souvent accepté.

Que signifie Michaelmas aujourd’hui dans le droit anglais ?

Michaelmas marque l’ouverture de la legal year (début octobre) et demeure une référence cérémonielle et organisationnelle des juridictions supérieures.

D’où vient le 6 avril comme début de l’année fiscale britannique ?

De l’ancienne année financière alignée sur Lady Day, décalée lors de l’adoption du calendrier grégorien et ajustée ensuite au 6 avril.

Existe-t-il des équivalents des Quarter Days en Europe continentale ?

Oui, sous des formes variées : jours de terme urbains en France, échéances rurales à Michaelis en Allemagne, et d’autres repères saisonniers liés à de grandes fêtes religieuses ou civiques.