2590

Pourquoi certaines années ont 13 mois : mois intercalaires et calendriers lunisolaires

Pourquoi certaines années ont-elles 13 mois ? Dans les calendriers lunisolaires, on ajoute périodiquement un mois intercalaire pour que les mois lunaires restent synchronisés avec les saisons solaires. Ce mécanisme d’intercalation maintient les fêtes au bon moment de l’année et explique pourquoi certaines dates semblent « glisser » dans le calendrier grégorien.

En deux mots

Un calendrier lunisolaire compte les mois selon la Lune (nouvelle lune à nouvelle lune) mais veut suivre le cycle du Soleil (les saisons). Comme 12 mois lunaires font moins qu’une année solaire, on ajoute un 13e mois de temps à autre. Ce mois additionnel est le mois intercalaire.

L’écart fondamental : Lune vs Soleil

Un mois synodique (de nouvelle lune à nouvelle lune) dure en moyenne 29,53 jours. Douze mois lunaires totalisent donc environ 354,36 jours, soit environ 11 jours de moins que l’année tropique solaire de 365,2422 jours. Sans correction, les mois et les fêtes glisseraient à travers les saisons (en trois ans, près d’un mois de décalage).

La solution employée par les calendriers lunisolaires est l’intercalation : on insère un mois supplémentaire quand l’écart s’accumule. En moyenne, cela arrive 7 fois tous les 19 ans, un rythme qui suit le cycle métonique (235 mois lunaires ≈ 19 années solaires).

Qu’est-ce qu’un mois intercalaire ?

Un mois intercalaire est un mois entier ajouté à une année qui en comptera alors 13. L’objectif est de réaligner le calendrier lunaire sur l’année solaire pour que les saisons et les fêtes restent cohérentes (Pâque juive au printemps, Nouvel An chinois entre janvier et février, grandes fêtes hindoues à leurs périodes saisonnières).

  • Fréquence typique : 7 années sur 19 comportent un mois intercalaire (≈ 36,8 %).
  • Durée des mois lunaires : alternance de 29 ou 30 jours selon les systèmes.
  • À distinguer du jour additionnel du calendrier grégorien (année bissextile), qui n’ajoute pas un mois mais un jour (29 février).

Trois grands systèmes lunisolaires

1) Le calendrier chinois

Le calendrier traditionnel chinois est lunisolaire. Les mois commencent à la nouvelle lune et les saisons sont suivies par 24 jalons solaires (jieqi), dont 12 termes principaux (zhongqi) liés au parcours du Soleil. La règle moderne clé :

  • Le mois qui ne contient pas de zhongqi est déclaré mois intercalaire (rùn yuè, 闰月).
  • Ce mois porte le même numéro que le mois précédent (on parle par exemple d’un « 4e mois intercalaire »).
  • Le mois 11 est celui qui contient le solstice d’hiver. Entre deux solstices d’hiver, s’il y a 13 nouvelles lunes, l’une devient le mois intercalaire.

Conséquence visible : des années comptent 13 mois, ce qui déplace certaines fêtes dans le calendrier grégorien. Par exemple, le Nouvel An chinois peut tomber entre le 21 janvier et le 20 février. Des festivals purement solaires comme Qingming (autour du 4–6 avril) ne bougent presque pas, car ils dépendent d’un terme solaire.

Exemples concrets :

  • Une année avec « 2e mois intercalaire » décale le Festival des bateaux-dragons (5e jour du 5e mois lunaire) plus tard dans le calendrier grégorien que l’année précédente.
  • Le Festival de la mi-automne (15e jour du 8e mois) varie entre fin septembre et début octobre selon l’intercalation.

2) Le calendrier hébraïque (Adar II)

Le calendrier hébraïque suit également le cycle métonique. Sur un cycle de 19 ans, 7 années sont « embolismiques » (avec mois intercalaire), précisément les années 3, 6, 8, 11, 14, 17 et 19 du cycle.

  • En année ordinaire : 12 mois (dont Adar en fin d’année).
  • En année embolismique : Adar I (30 jours) + Adar II (29 jours). Purin est célébrée en Adar II.
  • L’objectif est de conserver Pessa’h (Nissan) au printemps, comme prescrit.

Ce système maintient les grandes fêtes dans leurs saisons : Roch Hachana et Souccot restent en automne, Pessa’h au printemps. Côté grégorien, ces fêtes se déplacent d’une année sur l’autre, parfois sensiblement en années avec Adar II.

Cas pratiques :

  • Un anniversaire en Adar (année ordinaire) se gère différemment en année avec Adar I/II selon la coutume.
  • L’ajout d’Adar I pousse Purin environ un mois plus tard par rapport au calendrier civil.

3) Les calendriers indiens lunisolaires

Les calendriers hindous, avec variantes régionales, sont lunisolaires. Deux pratiques dominent :

  • Amānta (Inde du Sud) : le mois se termine à la nouvelle lune.
  • Pūrṇimānta (Nord) : le mois se termine à la pleine lune.

Le mois intercalaire s’appelle Adhika Māsa (parfois Purushottam Masa). Il est inséré lorsqu’un mois lunaire ne contient aucunsaṅkrānti (entrée du Soleil dans un nouveau signe zodiacal). Le mois sans saṅkrānti devient un Adhika du nom du mois suivant, puis vient le mois « régulier » (Nija) portant le même nom.

Exemples :

  • Si aucun saṅkrānti ne se produit pendant un mois, on obtient Adhika Āṣāḍha, suivi de Nija Āṣāḍha.
  • Les grandes fêtes saisonnières (p. ex. Navarātri en Aśvina) restent en automne, mais leurs dates grégoriennes se déplacent.

Traditionnellement, peu de grandes cérémonies sont programmées durant Adhika Māsa (on le consacre à la dévotion, notamment à Vishnou), mais les observances lunaires récurrentes (Ekādaśī, Pleine Lune, Nouvelle Lune) sont tenues normalement.

Pourquoi 13 mois ? La logique mathématique

Le cœur du système tient dans une relation remarquable :

  • 235 mois lunaires ≈ 19 années solaires.
  • En 19 ans, 12 mois × 19 = 228 mois. Il manque 7 mois pour atteindre 235.
  • Conclusion : on ajoute 7 mois intercalaires sur 19 ans.

Ce ratio (7/19) maintient le décalage à l’intérieur d’une fourchette gérable. Concrètement, une année « à 13 mois » survient en moyenne tous les deux ou trois ans.

Exemples de dates qui se déplacent

  • Nouvel An chinois : varie de fin janvier à fin février. Une année avec mois intercalaire peut le repousser vers la fin de cette fenêtre.
  • Purin (hébreu) : célébrée en Adar II lors des années embolismiques, donc environ un mois plus tard par rapport au civil.
  • Pessa’h : reste au printemps, mais peut tomber plus tôt ou plus tard en grégorien selon l’intercalation et les règles de report.
  • Fêtes hindoues (p. ex. Janmāṣṭamī, Gaṇeśa Caturthī) : leur date grégorienne varie beaucoup d’année en année, et un Adhika Māsa peut décaler les cycles d’un mois lunaire.
  • Festival de la mi-automne (Chine) : se tient autour de la pleine lune d’automne, entre fin septembre et début octobre, selon l’intercalation.

Comment lire un convertisseur de dates avec un mois intercalaire

Les convertisseurs en ligne peuvent afficher des résultats surprenants lorsqu’un mois intercalaire est en jeu. Voici comment interpréter les mentions :

  • Chinois : repérez « leap », « rùn » ou « L » devant le numéro du mois (ex. « L4 » pour 4e mois intercalaire). Un mois « dupliqué » n’est pas une erreur, c’est la règle.
  • Hébreu : distinguez Adar I et Adar II. Les fêtes comme Purin tombent en Adar II, tandis que les yahrzeits et anniversaires peuvent suivre des règles communautaires spécifiques.
  • Indien : cherchez « Adhika » (par ex. Adhika Śrāvaṇa). Vérifiez si le site utilise la convention Amānta ou Pūrṇimānta, car le nom du mois peut changer selon la région.
  • Fuseau horaire : les nouvelles lunes et entrées solaires sont des événements astronomiques sensibles au lieu. Réglez le convertisseur sur votre localisation (Pékin pour le calendrier chinois, Jérusalem pour l’hébreu selon les pratiques, ville locale pour les calendriers indiens).
  • Début du jour : en calendrier hébraïque, le jour commence au coucher du soleil. Un événement indiqué « mardi » peut commencer dès le lundi soir. Les calendriers indiens suivent des tithi (phases lunaires) qui peuvent changer de jour civil en cours de journée.
  • Observances solaires : des fêtes ancrées sur des termes solaires (ex. Qingming) restent quasi fixes dans le grégorien, même en année à 13 mois.

Questions fréquentes (FAQ)

Quelle est la différence entre un calendrier lunaire, solaire et lunisolaire ?

Un calendrier lunaire suit uniquement les phases de la Lune (ex. islamique). Un calendrier solaire suit le cycle du Soleil (ex. grégorien). Un calendrier lunisolaire combine les deux : les mois sont lunaires, mais l’année est corrigée pour coller aux saisons via des mois intercalaires (ex. chinois, hébraïque, hindou).

À quelle fréquence les années ont-elles 13 mois ?

En moyenne, environ 7 années sur 19 (soit ~36,8 %) comportent un mois intercalaire. Concrètement, cela revient souvent tous les 2 à 3 ans.

Le mois intercalaire tombe-t-il toujours à la fin de l’année ?

Non. En calendrier hébraïque, on ajoute un Adar I avant Nissan (donc plutôt en fin d’année), mais en calendrier chinois, le mois intercalaire peut dupliquer n’importe quel mois si ce mois ne contient pas de terme solaire principal. En calendriers indiens, l’Adhika Māsa peut aussi survenir à différents moments de l’année.

Pourquoi le Nouvel An chinois change-t-il autant de date ?

Parce que le mois 1 commence à la nouvelle lune la plus proche d’un repère solaire hivernal. La présence d’un mois intercalaire dans l’année précédente ou en cours peut décaler la date dans la fenêtre allant du 21 janvier au 20 février.

En année hébraïque embolismique, pourquoi fêter Purim en Adar II ?

Pour garder la cohérence saisonnière et rapprocher Purim de Pessa’h (au printemps). Adar II est considéré comme le « véritable Adar » pour les fêtes publiques, tandis que Adar I est l’intercalaire.

Qu’est-ce que l’Adhika Māsa dans les calendriers hindous ?

C’est le mois intercalaire ajouté lorsqu’un mois lunaire ne contient aucun saṅkrānti (changement de signe solaire). Il prend le nom du mois suivant (par exemple, Adhika Bhādrapada), puis vient le mois « régulier » (Nija) du même nom.

Pourquoi un convertisseur affiche-t-il parfois deux mois avec le même nom ?

Ce n’est pas une erreur. En calendrier chinois, un mois sans terme solaire principal devient un mois intercalaire qui duplique le mois précédent. En hébreu, on a Adar I et Adar II. En indien, un Adhika est suivi d’un mois « Nija » portant le même nom.

À retenir

Si certaines années comptent 13 mois, c’est grâce à la logique précise de l’intercalation dans les calendriers lunisolaires. Ce mécanisme, attesté dans le chinois, l’hébraïque (avec Adar II) et les calendriers indiens (Adhika Māsa), assure que les fêtes restent liées aux saisons. Lorsqu’un convertisseur mentionne un « leap month », « Adar II » ou « Adhika », vous savez désormais pourquoi — et comment lire correctement la date correspondante.